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Comité stéphanois
7 août 2009

Les oiseaux de passage

Les oiseaux de passage - poème de Jean Richepin (1849-1926) / mis en chanson par Georges Brassens : [C'est une cour carrée et qui n'a rien d'étrange : Sur les flancs, l'écurie et l'étable au toit bas ; Ici près, la maison ; là-bas, au fond, la grange Sous son chapeau de chaume et sa jupe en plâtras. / Le bac, où les chevaux au retour viendront boire, Dans sa berge de bois est immobile et dort. Tout plaqué de soleil, le purin à l'eau noire Luit le long du fumier gras et pailleté d'or. / Loin de l'endroit humide où gît la couche grasse, Au milieu de la cour, où le crottin plus sec Riche de grains d'avoine en poussière s'entasse, La poule l'éparpille à coups d'ongle et de bec. / Plus haut, entre les deux brancards d'une charrette, Un gros coq satisfait, gavé d'aise, assoupi, Hérissé, l'œil mi-clos recouvert par la crête, Ainsi qu'une couveuse en boule est accroupi. / Des canards hébétés voguent, l'oeil en extase. On dirait des rêveurs, quand, soudain s'arrêtant, Pour chercher leur pâture au plus vert de la vase Ils crèvent d'un plongeon les moires de l'étang. / Sur le faîte du toit, dont les grises ardoises Montrent dans le soleil leurs écailles d'argent, Des pigeons violets aux reflets de turquoises De roucoulements sourds gonflent leur col changeant. / Leur ventre bien lustré, dont la plume est plus sombre, Fait tantôt de l'ébène et tantôt de l'émail, Et leurs pattes, qui sont rouges parmi cette ombre, Semblent sur du velours des branches de corail. / Au bout du clos, bien loin, on voit paître les oies, Et vaguer les dindons noirs comme des huissiers. Oh ! qui pourra chanter vos bonheurs et vos joies, Rentiers, faiseurs de lards, philistins, épiciers ?] / Ô vie heureuse des bourgeois Qu'avril bourgeonne Ou que decembre gèle, Ils sont fiers et contents / Ce pigeon est aimé, Trois jours par sa pigeonne Ça lui suffit il sait Que l'amour n'a qu'un temps / Ce dindon a toujours Béni sa destinée Et quand vient le moment De mourir il faut voir / Cette jeune oie en pleurs C'est la que je suis née Je meurs presd de ma mère Et je fais mon devoir / Elle a fait son devoir C'est a dire que Onques Elle n'eut de souhait Impossible elle n'eut / Aucun rêve de lune Aucun désir de jonque L'emportant sans rameurs Sur un fleuve inconnu / [Elle ne sentit pas lui courir sous la plume De ces grands souffles fous qu'on a dans le sommeil, pour aller voir la nuit comment le ciel s'allume Et mourir au matin sur le coeur du soleil.] / Et tous sont ainsi faits Vivre la même vie Toujours pour ces gens là Cela n'est point hideux / Ce canard n'a qu'un bec Et n'eut jamais envie Ou de n'en plus avoir Ou bien d'en avoir deux / [Aussi, comme leur vie est douce, bonne et grasse ! Qu'ils sont patriarcaux, béats, vermillonnés, Cinq pour cent ! Quel bonheur de dormir dans sa crasse, De ne pas voir plus loin que le bout de son nez !] / Ils n'ont aucun besoin De baiser sur les lèvres Et loin des songes vains Loin des soucis cuisants / Possèdent pour tout coeur Un vicere sans fièvre Un coucou régulier Et garanti dix ans / Ô les gens bien heureux Tout à coup dans l'espace Si haut qu'ils semblent aller Lentement un grand vol / En forme de triangle Arrivent planent, et passent Où vont ils? ... qui sont-ils ? Comme ils sont loins du sol / [Les pigeons, le bec droit, poussent un cri de flûte Qui brise les soupirs de leur col redressé, Et sautent dans le vide avec une culbute. Les dindons d'une voix tremblotante ont gloussé. / Les poules picorant ont relevé la tête. Le coq, droit sur l'ergot, les deux ailes pendant, Clignant de l'œil en l'air et secouant la crête, Vers les hauts pèlerins pousse un appel strident. / Qu'est-ce que vous avez, bourgeois ? soyez donc calmes. Pourquoi les appeler, sot ? Ils n'entendront pas. Et d'ailleurs, eux qui vont vers le pays des palmes, Crois-tu que ton fumier ait pour eux des appas ?] / Regardez les passer, eux Ce sont les sauvages Ils vont où leur desir Le veut par dessus monts / Et bois, et mers, et vents Et loin des esclavages L'air qu'ils boivent Ferait éclater vos poumons / Regardez les avant D'atteindre sa chimère Plus d'un l'aile rompue Et du sang plein les yeux / Mourra. Ces pauvres gens Ont aussi femme et mère Et savent les aimer Aussi bien que vous, mieux / Pour choyer cette femme Et nourrir cette mère Ils pouvaient devenir Volailles comme vous / Mais ils sont avant tout Des fils de la chimère Des asoiffés d'azur Des poètes des fous / [Ils sont maigres, meurtris, las, harassés. Qu'importe ! Là-haut chante pour eux un mystère profond. A l'haleine du vent inconnu qui les porte Ils ont ouvert sans peur leurs deux ailes. Ils vont. / La bise contre leur poitrail siffle avec rage. L'averse les inonde et pèse sur leur dos. Eux, dévorent l'abîme et chevauchent l'orage. Ils vont, loin de la terre, au dessus des badauds. / Ils vont, par l'étendue ample, rois de l'espace. Là-bas, ils trouveront de l'amour, du nouveau. Là-bas, un bon soleil chauffera leur carcasse Et fera se gonfler leur cœur et leur cerveau. / Là-bas, c'est le pays de l'étrange et du rêve, C'est l'horizon perdu par delà les sommets, C'est le bleu paradis, c'est la lointaine grève Où votre espoir banal n'abordera jamais.] / Regardez les vieux coqs Jeune Oie édifiante Rien de vous ne pourra Monter aussi haut qu'eux (2x) / Et le peu qui viendra d'eux à vous C'est leur fiante Les bourgeois sont troublés De voir passer les gueux.

L'italique et les crochets siganlent que ces parties du poème original de Richepin n'ont pas été retenues par Brassens pour la mise en chanson.

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